L’industrie du diamant naturel s’accorde pour un avenir plus responsable

Bijou éthique Expertise

Écrit par Julie de Los Rios - Mardi 26 septembre 2023

Rendez-vous était pris le 3 juillet, pendant la semaine de la Haute Couture à Paris, pour une conférence-débat, Diamant Transformation, organisée par le Natural Diamond Council (NDC). La thématique ? L’impact environnemental et social de l’industrie du diamant naturel et ses engagements. Compte-rendu.

Informer et sensibiliser les consommateurs sur le monde incroyable des diamants naturels, l’industrie et son impact mondial… Telle est la mission que s’est fixée le NDC. Grâce à sa plateforme Only Natural Diamonds, l’organisation mondiale à but non lucratif, présente aux Etats-Unis, en Chine, en Inde, aux Émirats arabes unis et en Europe, est devenue une référence en ce qui concerne les diamants naturels, de la pop culture aux diamants épiques en passant par les tendances joaillières ou les guides d’achat.

Le 3 juillet 2023, le NDC a profité de la semaine de la Haute Couture à Paris, durant laquelle les maisons de joaillerie présentent leurs collections de Haute joaillerie, pour organiser une conférence-débat baptisée Diamant Transformation. « Notre objectif est de sensibiliser les consommateurs sur le diamant naturel, notre industrie et notre impact mondial », a précisé Kristina Buckley Kayel, Directrice Générale du NDC pour l’Amérique du Nord. Les chefs de file du diamant naturel ainsi que des membres de la communauté botswanaise avaient répondu « présents » pour cette rencontre.

La thématique ? L’impact environnemental et social de l’industrie du diamant mais aussi ses défis et ses engagements. Kristina Buckley Kayel a ouvert le bal en prenant la parole la première. « Notre objectif est de sensibiliser les consommateurs et de leur faire apprécier la valeur des diamants naturels et le rôle de cette industrie, qui permet notamment à plus de 10 millions de personnes dans le monde de gagner leur vie, d’assurer leur bien-être, et de protéger la biodiversité d’espèces et d’écosystèmes qui seraient autrement vulnérables. »

Intervenants de la conférence-débat Diamant Transformation : André Messika, Marie-Claire Daveu, Livia Firth, Kesego Kereemang et Iris Van der Veken © Jack Tribeca

Émancipation des femmes, impact positif, neutralité carbone, biodiversité…

Orchestrés par Livia Firth MBE, la fondatrice d’Eco-Age (une agence de conseil britannique qui encourage entreprises et associations dans des démarches éthiques et durables) reconnue Leader of Change par les Nations Unies et lauréate du prix Fashion 4 Development des Nations Unies et du prix Rainforest Alliance, les échanges ont porté sur l’avancée et les objectifs du secteur, en affirmant que les efforts sont bien plus nombreux que n’importe quelle autre industrie au niveau du progrès social et de la responsabilité sociétale des entreprises. Notamment grâce au Processus de Kimberley initié en 2003. Largement porté par le groupe De Beers, cet accord vise à éradiquer le commerce des diamants issus de zones de conflits sur le plan international. Pour valoriser les efforts faits, Livia Firth a souligné que le processus d’implantation d’une mine est long et complexe, du début à la fin. « Ouvrir une mine implique d’avoir un plan incluant aussi un plan de sortie. »

En présence de l’ambassadrice du NDC, l’actrice Lily James, les débats ont mis en lumière les différents défis que relève l’industrie du diamant naturel. Les thèmes abordés ? Traçabilité des diamants dans la chaîne d’approvisionnement, émancipation des femmes, soutien aux communautés locales, objectif de neutralité carbone et protection de la biodiversité. Devant un parterre d’invités prestigieux, les intervenants de haute volée se sont exprimés. Parmi ces experts, qui comme Livia Firth contribuent à faire progresser le secteur en apportant des changements significatifs, citons Marie-Claire Daveu, Directrice du Développement durable et des relations institutionnelles internationales de Kering, Co-Présidente Watch & Jewellery Initiative 2030 ; Kesego Kereemang, manager sécurité, santé et RSE de Lucara Botswana ; André Messika, fondateur et Président de André Messika Diamonds LTD ; ou encore Iris Van Der Veken, directrice exécutive et secrétaire général chez Watch & Jewellery Initiative 2030… L’accent a été mis sur le soutien financier apporté aux communautés locales des pays où sont extraits les diamants, sous forme d’achat locaux, d’emplois, de programmes sociaux et d’investissements dans les infrastructures, etc...

Livia Firth © Jack Tribeca

Accès gratuit à l’éducation et aux soins de santé

L’auditoire, composé de journalistes, parlementaires, fédérations, joailliers, cadres de LVMH et de maisons de luxe, a pu aussi bénéficier de témoignages probants. Exemple ? Lily James a raconté son voyage au Botswana. « Une expérience qui a changé ma vie. L’impact positif était partout où je regardais », a-t-elle souligné avant d’insister sur l’importance de communiquer avec ceux qui sont sur le terrain. « Je me sens investie d'une importante responsabilité sociale. Je dispose d'une plateforme et j'ai donc accès à des personnes – en particulier des jeunes – qui m'écoutent. Je veux partager mon voyage de découverte avec eux. Visiter le Botswana et constater l'impact de l'industrie du diamant sur la communauté m'a beaucoup inspirée. C'est une histoire que je veux continuer à partager », a-t-elle poursuivi.

Venue du Botswana, Kesego Kereemang a démontré l’impact positif qu’a l’industrie, notamment sur des enjeux sociétaux, rappelant que depuis l’extraction de diamants naturels, le pays offre un accès gratuit à l’éducation et aux soins de santé.

Enfin, Livia Firth a insisté sur le fait que d’autres industries pourraient s’inspirer de celle du diamant naturel, qui, en constante évolution, se démarque par sa démarche environnementale et sociale. Elle a rappelé aussi que l’effort observé dans l’industrie du diamant n’est pas aussi clair dans d’autres domaines comme la mode. Craignant des situations déséquilibrées comme dans l'industrie de la mode, elle fut agréablement surprise de constater une vraie transformation en visitant la mine de Karowe de Lucara.

Ses propos ont été appuyés par les interventions des autres experts. Avec plus de 20 ans d’expérience internationale dans les domaines des politiques publiques, de la mode, de la tech et de la joaillerie, ainsi qu’une formation en droit, Iris Van der Veken a joué un rôle majeur dans la transformation de l’industrie. « En examinant les contrats, j’ai souvent vu des choses qui pouvaient être améliorées du point de vue de la santé et de la sécurité, comme par exemple l’utilisation de produits chimiques. » Elle attribue au processus de Kimberley le mérite d’avoir déclenché une vague de transformation. « Nous sommes sur la bonne voie mais cela ne suffit pas. Nous devons intensifier et nous concentrer davantage sur des actions mesurables concernant notre impact », a-t-elle poursuivi.

Kesego Kereemang, Livia Firth et Lily James © Jack Tribeca

Une vague de transformation

« En 2005, De Beers a annoncé une charte sur ses principes de bonnes pratiques (Best Practice Principles ou BPP) et le Responsible Jewellery Council a été créé, ce qui a permis à l’industrie de s’unir pour la première fois autour de deux objectifs très spécifiques : la protection de l’intégrité de la chaîne de valeur et l’amélioration de la qualité des produits », a souligné Iris Van der Veken avant de mettre l’accent sur une autre grande étape du changement, en 2015, quand les 17 objectifs du développement durable ont été négociés, présentés et adoptés par tous les États membres des Nations unies. « Maintenant, je pense que l’un des plus grands sujets que nous devons aborder se situe au milieu de la chaîne d’approvisionnement, au cœur, là où se trouvent les petites entreprises qui n’ont pas la capacité d’améliorer réellement leurs pratiques », at-elle ensuite suggéré.

Autre initiative mise en avant lors de la soirée ? Celle impulsée par deux grands concurrents de l’industrie. En effet, Kering et Cartier ont fondé la Watch & Jewellery Initiative 2030, guidée par les 17 objectifs de développement durable et les dix principes du Pacte mondial des Nations Unies. La mission ? Créer une industrie horlogère et joaillière entièrement durable, portée par des valeurs d’intégrité, de transparence et de respect des droits de l’homme. Créée en 2021, elle réunit actuellement 55 membres.

Iris Van der Veken, directrice exécutive et secrétaire général chez Watch & Jewellery Initiative 2030 © Jack Tribeca

La traçabilité au cœur des priorités

Parmi les acteurs majeurs du secteur, Marie-Claire Daveu, Directrice du Développement durable et des relations institutionnelles internationales de Kering, a travaillé sans relâche pour une industrie toujours plus durable. « Lorsque je pense à l’industrie de la mode, de la joaillerie et de l’horlogerie, il est toujours question de transparence et de traçabilité. Nous ne pouvons pas prendre de mesures concrètes si nous ne savons pas d’où viennent les matières premières », a-t-elle noté, soulignant l’approche de Kering concernant les diamants et leur chaîne d’approvisionnement. « Plusieurs nouvelles technologies arrivent sur le marché pour faciliter la traçabilité. Nous utilisons l’innovation en matière de traçabilité de Sarine Technologies pour notre marque Boucheron, ce qui est très bien, mais ce qui est vraiment important ici, c’est d’avoir une technologie qui peut être utilisée par l’ensemble de l’industrie », a-t-elle affirmé avant de mettre l’accent sur les nouvelles réglementations mises en place par la directive Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) qui exigera des entreprises basées dans l’UE qu’elles divulguent davantage d’informations sur l’origine de leurs matières premières, du coton et de la soie jusqu’aux diamants. Voilà qui devrait fortement changer la donne à l’avenir.

Marie-Claire Daveu a conclu sur une note optimiste. « Je pense que ce que nous faisons est très important car lorsque nous aurons du volume et que nous représenterons de nombreuses marques, nous pourrons, ensemble, amener la chaîne d’approvisionnement à continuer à faire des efforts et à changer de paradigme », a-t-elle prédit avant de rappeler l’importance de la traçabilité.

Marie-Claire Daveu © Jack Tribeca

Un travail d’équipe

Une priorité partagée par André Messika. En tant que membre de la Watch & Jewellery Initiative 2030 et du Responsible Jewellery Council, sa société de négoce de diamants a lancé CarbonVero, un nouvel outil qui mesure l’empreinte carbone de tous les diamants naturels provenant de sa mine en Namibie, tout au long du processus d’extraction et de fabrication. « Je travaille dans ce secteur depuis plus de 55 ans et, depuis que j’y suis entré, j’ai toujours essayé de lutter pour la transparence. Pour moi, la transparence est ce qu’il y a de plus important », a-t-il noté. Pour chaque diamant, de plus de 0,25 carat, taillé et poli, The Carbon Trust fournira un certificat CarbonVero qui comprend toutes les données collectées. « C’est un travail d’équipe et j’espère que mes collègues suivront. C’est quelque chose qui va se développer très rapidement et qui est très important », a-t-il poursuivi.

André Messika © Jack Tribeca

Après avoir mis en lumière les efforts et les progrès mis en place par les différents acteurs de du diamant naturel, la soirée s’est achevée par un cocktail placé sous le signe de la convivialité et du partage, permettant aux invités de faire connaissance mais aussi de réfléchir ensemble au débat. Avec, en tête, un objectif commun plus large, celui d’écrire un avenir meilleur, tous ensemble, main dans la main. « Dans quel autre secteur peut-on observer une telle collaboration ? Le secteur n’est pas parfait, mais les progrès et l’engagement sont indéniables. » Ces quelques lignes tirées du discours d’introduction de Kristina Buckley Kayel résument à merveille l’engagement commun des membres de l’industrie.

Cette conférence-débat aura relevé un défi de taille : donner à chacun des invités mais aussi à tous ceux qui en auront eu écho la volonté de s’engager vers un monde meilleur. Chacun à sa mesure.

Article réalisé en collaboration avec le Natural Diamond Council.