Écrit par Paula Grineri - Lundi 3 avril 2017
Le Comité France Éclat* présentait le 21 février dernier, l’évolution du marché de l’horlogerie, bijouterie-joaillerie (HBJO) en France pour l’année 2016. L’occasion pour nous d’analyser les tendances de ce secteur et de soulever les enjeux majeurs pour les années à venir.
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En parallèle de l’incertitude causée par une période électorale, le marché a subi la régression des commerces de centre-ville qui, en plus des questions de sécurité posées par les attentats, connaissent une forte perte de compétitivité. Les consommateurs se déplacent en outre-manche ou encore au Japon pour profiter des prix devenus attractifs suite aux dévaluations des devises. En outre, nos grands concurrents que sont les Suisses, les Allemands ou les Japonais ne connaissent pas les mêmes restrictions que la France au sujet des limitations des paiements en espèces qui nous privent d’une partie des achats réalisés par les clients, Français ou étrangers sur notre territoire.
Les circuits spécialisés en galerie marchande ainsi que les bijouteries fantaisie continuent leur progression pour la deuxième année consécutive. Ces enseignes ont su s’adapter aux changements des comportements d’achat des consommateurs en proposant des lignes de produits fortement médiatisés ainsi que des bijoux en argent. La vente par internet reste dynamique en particulier sur les produits horlogers dont les ventes à distance représentent 7.6% des ventes en 2016.
Après des années record, les achats des consommateurs se sont tassés en 2016 pour atteindre 1.77 milliards d’euros contre 1.87 milliards en 2015, avec une forte baisse de la vente de montres de luxe (>1000 EUR).
La première concerne la baisse du volume d’achat des montres en France observée depuis plusieurs années. Certains experts avancent la perte d’intérêt des jeunes générations envers la montre au détriment d’autres appareils assurant les mêmes fonctions comme le téléphone portable. Toutefois l’engouement pour l’objet de mode demeure, ces consommateurs étant fortement influencés par la communication sur les réseaux sociaux. Ce sont les produits sans marque à forte valeur identitaire qui subissent ce phénomène.
Ensuite l’arrivée sur le marché des montres connectées pose la question à la fois d’une rupture de la technologie mais aussi de l’évolution vers des instruments multi-mesure, multi-usage. Toutefois nous n’avons pas encore assisté au déferlement annoncé probablement du fait des questions liées à l’autonomie et d’obsolescence de ces appareils.
Enfin l’horlogerie de luxe a fait les frais de sa trop grande dépendance vis-à-vis de la clientèle asiatique dont la demande a fortement chuté après la mise en place des lois protectionnistes d’anti-corruption, symptôme d’une autre tendance mondiale.
Les résultats de l’étude montrent que le marché de la bijouterie joaillerie s’est stabilisé après trois années de baisse de 2011 à 2013.
La bijouterie or tout titre représente toujours la part la plus importante des ventes mais il faut noter la belle progression des bijoux argent notamment grâce au succès des bijoux personnalisables, bracelets, charms et beads, dont les achats ont bondi de plus de 10% par rapport à l’année passée.
Les produits génériques et sans marque sont délaissés par les consommateurs tout comme en horlogerie.
La tendance à la personnalisation ne concerne pas uniquement les bracelets en argent ; les montres à bracelets interchangeables connaissent un beau succès (
Le segment le plus dynamique est « l’access luxe » pour lequel les études montrent que les consommateurs expriment leur intérêt pour les marques. Enfin, plusieurs indicateurs permettent de penser également que les bagues en argent ont de belles perspectives.
• La formation des jeunes générations est essentielle, pour la création, la gestion et la communication
• Il est important d’investir et de développer la création et l’innovation pour imaginer de nouvelles manières de concevoir et porter les bijoux
• La communication est indispensable qu’elle soit collective autour des matières (or par ex) ou pour favoriser l’émergence de nouvelles marques avec notamment l’utilisation des réseaux sociaux.
• Une politique volontariste de réduction des freins qui pèsent sur le commerce de la bijouterie joaillerie (accueil, faciliter le processus de détaxes, etc.) tout comme l’évolution des règles qui pénalisent les artisans et les commerçants (simplification administrative et fiscale, élargissement des horaires d’ouverture, etc…) permettront de regagner de la compétitivité sur notre territoire et auprès de la clientèle étrangère.
Au-delà de la perte d’attractivité liée aux attentats de 2015, cette étude démontre la nécessite de revoir notre modèle du commerce en ville par l’introduction de galeries marchandes plus luxueuses par exemple.
D’autre part, elle révèle également l’urgence de stimuler la demande de notre marché intérieur en s’inspirant des dispositions prises par plusieurs pays concurrents. Ainsi la Suisse, l’Angleterre ou le Japon ont mené des politiques volontaristes en termes d’accueil, de sécurité, de tarifs et autres facilités de détaxes. Il s’agit de mettre les distributeurs français à parité avec leurs compétiteurs.
En parallèle, il est nécessaire pour les horlogers, de bien définir leur positionnement en particulier sur les gammes moyennes sans négliger l’apport des nouvelles technologies. Le renouvellement générationnel dans le secteur de la bijouterie joaillerie devrait dynamiser ce secteur en apportant de nouveaux concepts de magasin, en s’appuyant sur les réseaux sociaux et en investissant dans la communication autour de la marque.
A bon entendeur…
* Comité Professionnel de développement de l’Horlogerie, de la Bijouterie, de la Joaillerie, de l’Orfèvrerie et des Arts de la Table.
** Source Etude Panel 5, estimation selon une modélisation du marché réalisée par l’extrapolation des achats réalisés par les consommateurs auprès des distributeurs et des marques sur la base de 30 millions d’achats enregistrés par le comité France Eclat et les statistiques mensuelles de vente transmises par 2000 points de vente partenaires. La Haute joaillerie n’est pas couverte par cette étude. Ces chiffres de vente concernent les achats d’HBJO pour leur usage propre ; ils ne comprennent pas les achats des Français à l’étranger, les pièces ré-exportées ou encore les achats pour gratification.