Écrit par Isis Eutrope - Jeudi 28 janvier 2021
Énergique, rayonnante et captivante, on ne se lasse jamais d'écouter la fabuleuse créatrice de bijoux contemporains
D'origine Suisse, elle étudie à Paris et part s'installer dans le New York un peu fou des années 80. Elle côtoie alors un petit cercle composé d'artistes comme Andy Warhol, Julian Schnabel, Francesco Clemente, Jeff Koons ou encore Jean-Michel Basquiat de qui elle est très proche. Cette émulation créative aura un grand impact sur son œuvre. Elle utilise la couleur et détourne pierres et matériaux pour rendre ces derniers plus ludiques, plus joyeux et plus vivants. On aime cette créatrice qui ne se prend pas au sérieux, pleine de positivité et totalement révolutionnaire, unique en son genre !
Nous avons échangé avec elle autour d'un verre dans les salons feutrés du Ritz Paris et nous vous livrons aujourd'hui toutes ses anecdotes.
Non, pas du tout. J’ai toujours adoré les bijoux et les pierres. Enfant, je jouais avec les bijoux de ma grand-mère et je lui demandais si je pouvais sortir les pierres, elle me disait non [rire]. Quand j’allais à la montagne avec mon grand-père et que je trouvais des petits cristaux j’étais toujours très fascinée et enthousiaste.
Puis lorsque je vivais à New York dans les années 80, j’étais complètement immergée dans le monde de l’art. C’était la belle époque là-bas, certainement pas la plus safe mais la plus drôle en tout cas ! J’ai donc développé ce sens de la couleur. Je trouvais que les bijoux n’étaient vraiment pas rigolos, c’était un style très Harry Winston avec de très grosses pierres. Je me disais qu’il fallait rendre la joaillerie un peu plus amusante et moins sérieuse, avec des couleurs ! J’ai donc commencé à créer des petites choses pour moi. J’ai traîné dans les ateliers pour apprendre le métier et dès que j’avais un peu de sous, j’ai commencé à me faire une collection de pierres.
Puis je suis allée à Genève. Contrairement aux ateliers à New York, qui ne s’intéressent pas aux nouveaux matériaux, les ateliers à Genève sont assez curieux. Au début ils n’aiment pas trop que je pousse leurs limites et leur donne des challenges, mais une fois qu’ils ont réussi, ils sont très contents et fiers. Il y a un petit désert à traverser entre temps…
On a commencé à travailler avec l’aluminium parce qu’il me permettait d’obtenir des couleurs que je n’arrivais pas à obtenir avec le titane. Tout le monde essayait de me décourager en disant que les couleurs ne tiendraient pas, mais moi j’ai dit « Allez, on y va ! ». Il est vrai qu’au début nous n’avons pas réussi à obtenir les couleurs qu’on voulait mais maintenant, j’arrive à faire du rouge, de l’orange et ça tient très bien. C’est génial car c’est très léger comme matériau !
Oui, c’est très original : on va chez Airbus en France, on arrive avec nos créations et c’est eux qui nous font les couleurs ! Ça les amuse beaucoup. On ne sait jamais trop comment la couleur va ressortir au final et il faut parfois beaucoup d’essais. Par exemple, pour le bracelet rouge Ça cartonne, il a fallu 8 à 9 mois pour arriver à fixer la couleur comme on le souhaitait. C’était un cauchemar parce que la couleur n’était jamais unifiée… mais il faut persévérer ! Je ne prends jamais non pour une réponse, je dis qu’on va y arriver. Il faut rester positif, c’est très important dans la vie. Et si vous voulez arriver à faire des choses nouvelles il faut prendre des risques, c’est comme ça. Et puis ça m’amuse, j’aime bien le challenge !
Je dirais divertissant, fun, « whimsical » comme on dirait en anglais. Les pierres sont toujours certifiées et recherchées sérieusement, mais les créations ne paraissent pas sérieuses : elles ont un côté conte de fée.
Je suis très portée sur les couleurs. La vie n’est pas toujours très gaie donc il faut y mettre un peu de soleil, un peu de couleurs. J’aime rendre les femmes heureuses et ajouter de l’humour à mes créations. C’est le plus grand luxe, de pouvoir créer des choses qui rendent les gens heureux.
Mon inspiration vient d’un peu partout car je suis très éclectique. Ça peut être la nature… souvent ça vient de l’art car je suis très liée à l’art contemporain. Je n’ai pas juste une source d’inspiration en particulier, tout comme je ne fais jamais de collections à thème car cela m’ennuie à mourir.
Souvent je crée d’abord la pièce et je cherche les pierres après ; parfois j’ai directement un coup de cœur sur une pierre. J’aime créer tout au long de l’année. Pour moi, il n’y a pas de période pour faire une collection parce que ça prend longtemps et je préfère que mes clients aient toujours de nouvelles choses à découvrir. Par exemple il a fallu un an et demi pour faire le bracelet Dragon of the Year et obtenir le résultat que je voulais.
La fermeture définitive de la maison de joaillerie Suzanne Syz est prévue pour fin février 2021, il reste un peu de temps pour aller voir les dernières pièces disponibles sur le site ! Pour les petits budgets : à la place d’un bijou, vous pouvez vous offrir le merveilleux livre
Suzanne Syz
12 Rue Robert-Céard
1204 Genève, Suisse