Écrit par Julie de Los Rios - Mardi 27 février 2024
Nous avons déjà abordé les
Au fil du temps et de l’acquisition de nouvelles pièces, la montre devient bien plus qu’un simple bijou qui donne l’heure ou un accessoire stylé et bien utile. Prenant de l’assurance face à l’objet, accumulant de la connaissance technique, les collectionneurs se dirigeront spontanément vers des modèles à complication. Les complications concernent bien entendu les montres mécaniques.
La montre mécanique n’est-elle déjà pas un objet assez compliqué en soi ? « Certainement pas » vous rétorqueront les horlogers, derrière leurs établis. Le regard porté sur l’infiniment petit, ces « savants fous » repoussent sans cesse les limites. Car, outre ses qualités esthétique et pratique, un garde-temps est avant tout une prouesse technique.
Concevoir une montre qui donne l’heure grâce à un mouvement mécanique – comprendre qu’elle fonctionne sans pile, grâce à un calibre qui se remonte manuellement ou grâce aux mouvements du porteur pour un modèle automatique – est déjà un exercice ardu. Comme si cela ne suffisait pas, les horlogers ont imaginé toutes sortes de complications.
Mais qu’est-ce qu’une complication ? Il s’agit d’une fonction autre que le simple affichage de l’heure et des minutes. Que celle ou celui qui n’a jamais acquiescé sans vraiment comprendre ce qu’était un quantième ou comment fonctionne un tourbillon lève la main…
Très prisées, les montres à complication sont donc équipées de modules ajoutés au mouvement – soit des rouages spécifiques supplémentaires. Et dans cette quête, le graal de l’artisan horloger comme du collectionneur reste la Grande Complication qui doit réunir, au minimum, une répétition minutes, un chronographe à rattrapante et un quantième perpétuel.
Les plus grandes manufactures font preuve de tout leur savoir-faire en présentant des chefs d’œuvres qui multiplient les fonctions. Citons par exemple Vacheron Constantin ou Patek Philippe qui excellent dans le domaine avec des montres de poche qui peuvent compter plus de 50 complications. Rien que ça !
Elles peuvent être techniques, pratiques, astronomiques, ludiques ou encore améliorer la précision de la montre. Pour vous, voici un tour d’horizon des principales complications, classées par famille. Vous allez devenir incollable en la matière !
Connaître la date et le jour, voilà une complication fort utile. Si vous entendez parler de quantième, certainement la fonction la plus courante, il s’agira d’un affichage de la date.
Comment cela fonctionne ? Très souvent, il s’agit d’un disque posé sur la périphérie du mouvement sur lequel sont marqués les nombres de 1 à 31. Chaque jour, à minuit, le disque avance. Sur un guichet – sous forme d’une ouverture sur le cadran plus ou moins travaillée et souvent placée à 3 ou 6 h – vous pourrez alors connaître la date du jour.
En complément des quantièmes, certaines montres sont dotées d’un autre disque qui affiche les jours, du lundi au dimanche.
Dans cette famille, il existe quelques variations. Par exemple, on parle de Grande date quand deux disques indépendants affichent les deux chiffres de la date. L’avantage ? La possibilité d’un affichage centré et plus grand donc plus facile à lire.
Le quantième annuel est un calendrier qui ajoute à la date le mois. Technique, le mécanisme prend alors en compte la durée des mois (30 ou 31 jours). Attention toutefois, le calendrier annuel ne s’adapte pas tout seul à la durée du mois de février (28 ou 29 jours). Il faudra donc régler la montre une fois dans l’année, le premier mars.
Enfin, le calendrier perpétuel, très prisé des connaisseurs, est une version plus sophistiquée puisqu’il ajoute un décompte sur 4 années et tient donc compte des années bissextiles. Dans ce cas, la date ne doit être réglée que pour les années bissextiles sautées, soit trois fois tous les 400 ans !
Il s’agit là d’une complication fort pratique pour les baroudeurs ou les working-girls qui parcourent la planète. En effet, la complication appelée GMT (qui tire son nom du temps moyen de Greenwich, en anglais Greenwich Mean Time) ou UTC (Temps universel coordonné), permet d’afficher l’heure sur un second fuseau horaire, et donc de connaître à la fois l’heure locale et l’heure qu’il est à la maison.
Cette complication se présente souvent sous forme d’une aiguille supplémentaire – elle peut se différencier par sa couleur ou par sa forme – sur le cadran. Cette dernière, contrairement à l’aiguilles des heures, ne fait qu’un tour de cadran en 24h, donc elle est deux fois moins rapide. Pour connaître alors l’heure GMT, le porteur consulte bien souvent une lunette graduée sur 24h.
Vous êtes à New-York pour un voyage d’affaires ? Cette fonction vous permet de connaître l’heure en France sans avoir à compter, soit ajouter 6 heures dans votre tête.
Mais comment ça fonctionne ? Une fois arrivée à destination, il suffit de régler l’aiguille GMT sur l’heure de votre domicile et l’aiguille des heures à l’heure locale. Pour faciliter encore les choses, des manufactures comme Rolex avec sa GMT Master ont créé des lunettes bicolores qui permettent à l’utilisateur de différencier l’heure jour/nuit donc savoir s’il est 6h du matin ou de l’après-midi. Hyper pratique ! Sait-on jamais, avec le jet-lag !
De nombreuses montres GMT sont désormais dotées d’une aiguille GMT détachée de l’aiguille des heures, permettant de régler les deux aiguilles de manière indépendante ou de régler l’aiguille des minutes et l’aiguille GMT simultanément.
Plus pointu encore et plus complexe encore, le Worldtimer permet de connaître l’heure sur tous les fuseaux horaires principaux de la planète en un clin d’œil. Cette complication est reconnaissable par son disque extérieur qui répertorie les villes références de 24 fuseaux horaires (ou plus). Cet anneau va tourner par un réglage de la couronne ou un poussoir.
Comment ? Pour cela, il suffit de positionner votre fuseau horaire à midi pour définir la position des autres villes de référence en fonction du fuseau local. Sur le deuxième anneau, marqué de 1 à 24 heures, sera alors indiquée l’heure exacte de chaque zone. Pour connaître l’heure à Londres ou New York, par exemple, il suffit de regarder l’heure en face de la ville choisie. Pour briller en soirée, racontez que Louis Cottier, horloger genevois, présente la première montre à heure universelle en 1930, lors des débuts de l’aviation.
Il existe différentes versions de la montre à sonnerie. La petite sonnerie émet un signal pour les quarts sans répéter les heures, la grande sonnerie sonne les quarts en répétant les heures. Une complication certes utile pour ne pas oublier l’heure mais quelque peu angoissante… Elle nous fait prendre conscience à quel point le temps passe vite ou lentement… Question de point de vue !
La répétition minutes, aussi appelée Reine des complications, sonne l’heure à la demande, inventée pour connaître l’heure dans le noir. En effet, en activant le poussoir, souvent positionné entre 7 et 9 h, le mécanisme va produire un son pour les heures, un pour les quarts puis un dernier pour les minutes. Les tonalités sont différentes, plus graves ou plus aigües pour aider le porteur de la montre. Pour bien la comprendre, il faudra adopter une nouvelle logique. Une fois maitrisée, cette complication ludique vous fascinera.
La fonction réveil permet de programmer une sonnerie pour une heure précise.
Grand classique des collections horlogères, pour offrir des looks plus sportifs, le chronographe permet de mesurer une durée, seconde, minutes, heures et parfois même quart, dixième ou millième de seconde. Mais quelle est la différence avec un chronomètre ? Un chronomètre est un chronographe qui a subi et relevé avec succès différents tests de fiabilité, de précision et de résistance, orchestrés par le COSC (Contrôle Officiel Suisse des Chronomètres).
Il existe plusieurs variations du chronographe. Le chronographe à retour en vol ou flyback permet de lancer un nouveau chronométrage alors que le premier est déjà en marche, en appuyant sur un seul poussoir. Le chronographe à « rattrapante » est muni d’une deuxième aiguille qui permet de mesurer des temps intermédiaires, puis de « rattraper » instantanément l’autre aiguille principale du chronographe.
Cette complication horlogère est très utile pour celui qui porte une montre mécanique à remontage automatique ou manuel. Elle permet de connaître l’autonomie de la montre et donc la durée de fonctionnement restante de devoir la remonter. Souvent indiquée sous forme de compteur, elle peut varier de 36 heures à une cinquantaine de jours.
Il a pour vocation d’améliorer la précision d’une montre en compensant les influences liées à la gravité terrestre sur le mouvement de la montre. Née d’une idée d’Abraham Louis Breguet en 1801 – permettre au balancier d’osciller à 360° et non seulement en position verticale – le tourbillon est une petite cage, contenant le balancier, le spiral et le système d’échappement, qui tourne sur elle-même et effectue une rotation complète en une minute.
Dès lors, les horlogers s’en emparent pour le revisiter sans cesse : incliné à 30 degrés à la fin du 20ème siècle pour plus d’efficacité, triaxial à l’instar du Gyrotourbillon de Jaeger-LeCoultre, volant donc plus léger et aérien… Au-delà de son aspect technique, il offre un spectacle fascinant sur le cadran de la montre. Il peut aussi revêtir une fonction esthétique, les maisons s’amusant à le décorer de motifs en tous genres. C’est le cas de Chanel, par exemple, qui le pare de diamants, comètes ou encore camélias, des codes signatures, chers à Mademoiselle Chanel.
Ces complications n’apportent pas d’information mais elles revisitent la manière de lire l’heure. Cela inclut un affichage autre que les simples trois aiguilles pour lire les heures-minutes-secondes. Parmi elles, citons la rétrograde, une tendance repérée au
« Un affichage est dit rétrograde lorsque l'indicateur n'effectue pas un tour complet de cadran mais revient à son point de départ (instantanément NDLR) pour entamer une nouvelle course après avoir parcouru l'entier de de son segment de mesure. Généralement, il s'agit d'un arc de cercle survolé par une aiguille » lit-on sur le site de Vacheron Constantin, adepte de l’affichage rétrograde.
Toujours dans cette volonté d’appréhender le temps de manière ludique, les heures ou minutes sautantes consistent au saut de l’aiguille ou de l’affichage numérique lors du passage de l’heure ou de la minute. Elle facilite la lecture en évitant de cacher une partie du chiffre.
Enfin, l’heure mystérieuse, à découvrir notamment chez Cartier, est une complication purement esthétique. Les aguilles, apparemment reliées à aucun axe, semblent flotter sur le cadran. Cela est rendu possible grâce à l’usage de disques transparents entraînés par l’extérieur.
Elles sont inspirées des horloges astronomiques dont l’un des plus beaux spécimens est à observer à Prague. Celle-ci affiche l’heure locale, les anciennes heures tchèques, l’heure soleil diurne, la position du soleil et de la lune dans le ciel, la phase de lune, le signe du zodiaque et le décan en cours, le temps sidéral mais aussi des automates qui se déclenchent à heure fixe.
Côté montres, la plus répandue des complications astronomiques est l’indication de la phase de lune, matérialisée par un disque partiellement caché sous le cadran. Entraîné par une roue dentée, il avance d’un cran chaque jour et permet de surveiller l’évolution de la lune. Si elle peut servir aux surfeurs qui guettent le mouvement des marées – qui dépendent elles-mêmes de la lune – c’est une complication plus poétique qu’utile au quotidien. Parfois, elle est incarnée par une sphère en 3D.
D’autres complications astronomiques, bien plus rares, existent. Citons l’indication du lever et du coucher du soleil ou de la lune, du coefficient des marées. Mais aussi l’équation du temps – Panerai, Breguet, Blancpain ou Audemars Piguet en ont présenté – qui affiche la différence entre le temps solaire « vrai » (celui de la nature donc) et le temps solaire moyen (celui de notre civilisation d’une durée conventionnelle de 24 h).
Enfin, la carte du ciel permet de dévoiler la configuration du ciel avec le mouvement des étoiles, la position de la lune et ses phases en cours de cycle. Certes, ces complications n’ont pas beaucoup d’utilité dans nos vies de citadins, mais elles sont, pour les manufactures, la meilleure manière d’illustrer tous leurs savoir-faire.
Vous voilà paré(e) pour épater la galerie par vos connaissances pointues en matière de tic-tacs. Vous ne regarderez plus les montres de la même manière, c’est certain ! Quantième, tourbillon, phase de lune ou encore répétition minute n’ont désormais plus de secret pour vous. Mais laquelle de ces complications vous séduit le plus ?