Écrit par Bérengère Treussard - Vendredi 8 novembre 2019
Le bijou vintage c’est mode ! C’est donc peut-être aussi le moment de vendre nos bijoux de famille aux enchères pour en tirer le meilleur prix ? Les trésors oubliés qui dorment au fond d’un coffre ou d’une veille boite à bijoux. Des bijoux d’un autre temps qui peuvent pourtant certainement intéresser des amateurs ou des collectionneurs. Comment faire ? Vendre ses bijoux aux enchères est une option tout à fait envisageable et même certainement très profitable. En effet, les ventes aux enchères sont souvent le lieu des bonnes affaires pour les acquéreurs mais également pour les vendeurs à condition de choisir la bonne maison de ventes aux enchères.
Nous nous sommes rapprochés de la Maison Christie’s, leader du marché dans ce secteur. En effet les activités en matière de ventes aux enchères de joaillerie de Christie’s remontent à 1795 ! Notamment avec la vente des bijoux de la Comtesse du Barry, maîtresse de Louis XV, dont le résultat a atteint £ 13000 soit l’équivalent de 2,4 millions d’euros actuels. On notera également que cette maison a vendu les bijoux de la Princesse Salimah Aga Khan ou encore réalisé un record du monde d’enchères avec 39, 3 millions d’euros pour le diamant rose « Princie » de 34,65 carats vendu à New York le 16 avril dernier.
Mais, je vous l’accorde, ce n’est toujours évident d’oser franchir les portes d’une Maison de Ventes aux enchères, qui plus est lorsqu’elle s’appelle Christie’s et qu’elle est située avenue Matignon.
Pourtant, Violaine d’Astorg, Directrice du Département Bijoux, nous accueille en toute simplicité avec le sourire comme elle accueillerait n’importe quel client ou visiteur. Nous nous sommes entretenus avec elle afin d’en savoir un peu plus sur les modalités et la mise en place d’une vente aux enchères de bijoux et surtout sur le processus d’évaluation des bijoux. L’idée après avoir lu cet article, c’est que vous n’ayez plus peur de franchir la porte du 9 avenue de Matignon à Paris et que vous osiez rencontrer la charmante experte Violaine.
Lorsque je suis arrivée chez Christie’s en avril 2018, ma mission était de maintenir l’image des ventes parisiennes, très design français provenant de la Place Vendôme et de relancer des évènements bijoux pour le département Christie’s France. Au cours de cette dernière année, nous avons mis en avant des figures importantes de la joaillerie et des créateurs magnifiques comme René Boivin ou Suzanne Belperron qui ont vraiment rayonné sur la création française.
Mon objectif plus personnel est plutôt de nous rendre plus accessibles, d’organiser des expositions, des conférences de manière à ce que les gens franchissent nos portes qui peuvent parfois paraître impressionnantes. Les expositions sont gratuites, d’ailleurs toutes les expositions pré-ventes sont gratuites et tout un chacun peut venir admirer des trésors. Un client me disait récemment : « C’est mieux qu’un musée ! ». Notre dernière exposition,
Nous avons deux ventes de bijoux dans l’année en juin et en décembre. Une vente aux enchères se construit en plusieurs étapes. :
– La première étape : le « business getting » qui se fait jusqu’à fin octobre par exemple pour la vente de décembre et avril-mai pour la vente de juin. D’une part, nous communiquons tout au long de l’année en région et nous organisons des journées d’expertise dans une dizaine de villes importantes et, d’autre part, nous envoyons des courriers à nos contacts et nos clients afin de les informer du thème de notre prochaine vente ou des dernières adjudications que nous avons réalisées. Par exemple, en décembre, nous allons mettre à l’honneur le joaillier Lacloche en lien direct avec la très belle exposition de l’Ecole des Arts Joailliers du 23 octobre au 20 décembre 2019. Pour la vente de juin, nous informerons nos clients en amont afin qu’ils puissent proposer à la vente des bijoux sur le thème de la tendance qui sera choisie.
Il faut savoir que nous « sourçons » beaucoup de pièces en France mais nous choisissons toujours la meilleure place à travers le monde pour les vendre : Hong Kong, Genève, Londres ou encore New York. Chaque site de Christie’s Jewel a un marché bien positionné. Par exemple, le Jade ne sera jamais vendu à Paris, nous le vendrons bien mieux à Hong-Kong.
– L’expertise et l’évaluation : c’est souvent lors des journées d’expertise que nous trouvons des pépites que les gens n’osent souvent pas nous présenter en pensant que cela n’a pas d’intérêt. Ces journées d’expertise sont gratuites et confidentielles. Nous nous déplaçons dans les grandes villes de l’hexagone : Reims, Bordeaux, Nantes, Biarritz, Aix-en-Provence, Marseille, Strasbourg… et également à Monaco.
– Le catalogue : nous envoyons toujours la maquette à nos clients afin qu’ils approuvent la façon dont leurs bijoux sont mis en avant dans notre catalogue. Nous sommes très soucieux de ce détail.
– L’exposition et la vente : quelques jours avant la vente, les bijoux sont exposés dans nos locaux à Paris. Par exemple, pour la vente du 5 décembre à 14 heures, vous pourrez venir admirer et essayer les bijoux dès le 30 novembre généralement de 10h à 18h soit 5 jours.
Lors de nos journées d’expertise que ce soit en province ou à Paris, nous prenons le temps avec nos clients : de poser des questions sur les provenances, de se faire ouvrir des coffres ou des boites à bijoux afin de dénicher les perles rares. Je dirais que c’est la partie la plus excitante de notre profession car nous ne savons jamais à l’avance ce que nous allons découvrir.
En ce qui concerne l’estimation d’un bijou, je dirais que c’est une équation parfaite entre une valeur de la matière pure (pierres, diamants, etc), sa signature par une grande maison ou pas, son époque et sa rareté sur le marché.
Par exemple, pour notre
Chaque type de pièce a son évaluation. L’équation ne doit jamais avoir d’inconnue sinon l’estimation finale n’est pas bonne. Il faut absolument trouver l’estimation la plus juste. Il ne faut jamais dévaluer une pièce ou la surestimer. Si une pièce est mal évaluée un professionnel ou un collectionneur peut passer à côté. Si nous estimons un bracelet Cartier à 20 000 euros alors qu’il en vaut 150 000 euros. Le marchand va penser qu’il y a des restaurations à faire sur la pièce ou que le poinçon ou la signature est partiellement effacée, bref que l’objet n’est pas bien conservé et ce n’est pas forcement ce qui l’intéresse donc il passera à côté. Si, en revanche je le surévalue à 300 000 euros, il ne va rien tenter car il est prêt à l’acheter 300 000 euros peut-être mais pas 350 000 euros et nous aurons raté notre vente.
64 % des pièces dans la dernière vente de juin ont été vendues au-dessus de l’estimation haute et nous vendons 94 % des objets de nos ventes ce qui prouve que nos estimations sont calibrées.
Cette estimation est la partie la plus compliquée de notre métier mais également la plus intéressante. En ce qui concerne les pierres, c’est également la même équation. Nous savons déterminer un prix au carat moyen en fonction de la pierre mais c’est la rareté et la qualité notamment avec l’absence de traitement sur la pierre qui va déterminer sa valeur.
Pour le diamant c’est un peu plus facile et beaucoup plus précis parce que pour le brillant (taille moderne) nous avons le « Rapaport » créé par Martin Rapaport qui est publié tous les vendredis et qui indique le prix du diamant taillé selon sa forme, sa couleur et sa pureté. Donc nous savons quasi-instantanément son prix. En ce qui concerne les diamants taille ancienne nous nous basons sur la forme poire du Rapaport.
Nous envoyons les pierres pour confirmer nos impressions au
Oui le vendeur a toujours comme prix de retrait l’estimation la plus basse. En dessous de cette estimation, nous ne vendons pas l’objet. Nous pouvons commencer l’enchère en dessous de l’estimation mais nous ne vendrons jamais en dessous de l’estimation basse qui est pour nous un « starting price ».
Ce que je dis à mes vendeurs c’est que nous sommes dans la même équipe, on vend ensemble donc on construit l’estimation également ensemble. Je veux que mon client se sente en confiance et qu’il soit parfaitement d’accord avec l’estimation et donc le prix de retrait.
Nous ne refusons jamais rien mais nous avons un seuil en dessous duquel nous ne pouvons pas vendre correctement, notre Maison n’est pas calibrée pour cela. Dans ce cas là, nous conseillons au mieux nos clients afin qu’ils puissent retirer le meilleur prix de leurs bijoux.
Nos clients sont des particuliers et des collectionneurs privés et nous souhaitons avoir un rapport privilégié et de confiance avec eux qui s’inscrit dans la durée. Nous trouvons toujours les meilleures solutions pour nos clients.
Nous avons à coeur de suivre le client et de rester disponible ensuite jusqu’à la vente pour l’accompagner au mieux. Ce que nous voulons c’est qu’il puisse vendre au meilleur prix tout en restant dans celui du marché.
Il faut avant tout acheter des bijoux intelligemment, se mettre une limite d’enchère et faire confiance aux experts et à leur estimation en essayant de ne pas trop dépasser l’estimation haute.
Il ne faut surtout pas hésiter à aller voir les bijoux, à les essayer, et à poser des questions aux experts. Enfin, se fixer une limite d’enchères est indispensable car il y a les frais de vente à ajouter en sus du prix d’adjudication.
Aujourd’hui on peut acheter un bijou ancien à n’importe quel prix, il y en a pour toutes les bourses et c’est vraiment très plaisant. On peut trouver une charmante broche 19ème ou Charles X ou début du siècle pour 500 euros, des bagues art déco à moins de 500 euros. Tous les diamants vendus aux enchères sont généralement à 50 % du prix du cours ce qui est relativement intéressant. Et en ce moment miser sur les bijoux des années 70-80 c’est une bonne option.
Un ensemble en perles fines avec plusieurs colliers et un beau bracelet XIXe serti avec une perle conche naturelle épaulée de deux perles fines.
Une collection de deux jolies pièces par Lalique, plusieurs diamants dont deux belles pierres estimées à 100 000 euros pour l’une et 200 000 euros pour l’autre.
Et enfin une sélection de bijoux signés de la Place Vendôme des années 30 avec deux bracelets manchette en diamants par Cartier, des années 40 avec le bracelet Cartier « boules » serties de diamants, une broche Harry Winston sertie de 20 carats de diamants.
9 Avenue de Matignon
75008 Paris
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Violaine d’Astorg
Tel:+33 1 40 76 85 81
Propos recueillis par Isis Eutrope en partenariat avec Christie’s